LA CARICATURE
OU
LE PARTI D'EN RIRE

Le monde n'est pas beau, le monde n'est pas juste ; la caricature prend le parti d'en rire. Elle associe ainsi le burlesque aux situations les plus tragiques. Pour Robert Philippe, auteur d'une Histoire de la caricature et des affiches aux Editions Nathan, "cette manière shakespearienne" est la règle d'or de la caricature : " Sauvegarder le rire même à l'heure de l'extrême onction, c'est sa manière de garantir l'espoir, de glisser dans le cœur des vaincus la secrète consolation d'une revanche " : celle de l'esprit par le trait !

Jamais on ne vit plus d'insolence au centimètre carré ! Avec une étonnante économie de moyens ( peu de mots, un dessin simplifié), la caricature frappe les esprits. Cruelle, elle se rue sur tous les défauts et les grossit pour mieux les dénoncer ; l'exagération lui est naturelle ; la caricature est toujours partisane : delà le vocabulaire guerrier qui nomme " charge "ce genre du dessin. "Caricatura" est, en italien, un dérivé du participe passé "caricare" : " Charger ". Le terme est répertorié en français dès 1740 et signifie un portrait ridicule en raison de l'exagération des traits.

La caricature est l'inverse de la complaisance ou de la discrétion diplomatique qui fait pudiquement détourner les yeux des imperfections tant physiques que morales, politiques, constitutionnelles…La caricature est donc par nature grossière comme le paraissait Socrate aux aristocrates athéniens. Comme lui, elle pointe avec une naïveté délibérée tout ce qui ne va pas et qu'on laisse pourtant aller. Sans cesse en prise avec l'époque et l'actualité, elle s'arrête sur l'anecdote, mais ses reproches sont toujours les mêmes ( corruption, injustice, manipulation). Ces représentations scandent la triste loi du monde mais elles ne s'y résignent pas. La caricature fait de la représentation une dénonciation. Comme l'ironie socratique, elle est une arme de combat redoutable.

Mais, notons d'emblée que tout peut-être tourné en ridicule : la naïveté généreuse comme les pires exactions. Le ridicule ne devrait donc pas, en soi, être une clause de refus. Provoquer le rire est un art qui s'apprend : il a ses astuces, ses recettes, ses propres stéréotypes. Dès l'Antiquité, les écoles de rhétorique enseignaient l'usage infamant des images et des comparaisons. Ce qui est vrai dans le registre du verbe l'est aussi pour celui du dessin.

La critique est toujours facile. Tout ce qui existe, en tant justement que cela existe, nous semble une particularisation imparfaite d'un idéal dont nous profilons approximativement les contours mentalement ; tout ce qui existe prête donc nécessairement son flan à la critique (même s'il faut noter, avec Hegel, qu'il faut se résoudre à la particularité pour exister). Les traits de notre homme sont-ils saillants ? L'œil du caricaturiste y verra un signe de dessèchement intérieur et une raideur impropre à la plasticité vitale. Mais ces traits eussent-ils été tout le contraire - donc arrondis et joviaux-, le caricaturiste les eut rendus avachis ou rebondis, c'est-à-dire tout sauf nobles et propres à inspirer le respect. Car la caricature est par essence irrévérencieuse. C'est d'ailleurs en cela qu'elle fut, pendant de longs siècles, interdite et lourdement condamnée. Elle demeure sous haute surveillance dans tous les pays non-démocratiques. Voir à ce propos les "amendements Dilem" en Algérie.

On ne parle au tyran que par parabole ; les premières caricatures qui dénonçaient les puissants le firent sous des formes allégoriques qui ne les rendaient compréhensibles qu'à un public cultivé. De toute façon le papyrus, le parchemin ou le papier étant d'abord rare et le dessin non reproductible, la circulation des estampes se réduisait à un marché très étroit, celui des lettrés, des nobles, c'est-à-dire d'autres puissants.

Dans Sinouhé l'Egyptien, Mika Waltari montre d'abord l'art égyptien enchaîné au canon classique ; Thotmès, l'artiste, et l'ami du jeune médecin Sinouhé, produit pour ses riches clients des caricatures qui dénoncent la mainmise des prêtres sur l'organisation politique du pays. Mais la parenthèse imposée par le renversement de régime ouvrira la voie, le temps éphémère du règne d'Akhenaton (vers 1375-1354 av. J.-C.) à un nouveau mode d'expression.

La caricature est un mode de la représentation qui fleurit en période de crise politique. Son existence même est le symptôme d'un déclin des valeurs et des puissances en place, mais elle est aussi un accélérateur de ce déclin : " Gouverner, c'est faire croire ", c'est donc contrôler l'imaginaire des gouvernés. Dès que les soumis deviennent capables d'imaginer un autre mode d'organisation, la dissidence s'instille, la fronde gronde, la révolte enflamme les esprits.

 

Régis Debray dans son Cours de médiologie générale, recommande de ne jamais dissocier l'étude des images et celle de leur mode de diffusion (donc aussi de fabrication). Nous vous proposons une courte Histoire de la caricature !

L'essor de la caricature est tributaire de l'imprimerie.

Certes la caricature existait avant mais elle était prisonnière de son support comme la fresque l'est de la paroi, le vitrail de la verrière, l'enluminure du manuscrit : l'image ne circulait pas.
Et comme la caricature était réduite à immiscer son insolence dans des œuvres commandées par les puissants, sa grammaire était sibylline, son trait codé et son espace d'expression souvent en marge des figures centrales qui attirent d'abord l'attention.

 

 

 

 

 

 

 

 

Avec la xylographie, l'image devient reproductible.

Les " Planches " sont l'instrument du tirage de l'image à plusieurs exemplaires.Les premières feuilles sont distribuées par les colporteurs ainsi que les premières cartes à jouer et les images des Saints. Au XVème siècle, au pays de Gutenberg, l'estampe est l'arme de la révolte des Paysans, comme de celle des Protestants, les deux causes associant leurs vœux de changement. NB l'appellation " Protestant " ne signifie pas, étymologiquement, la contestation de l'autorité papale mais le serment solennel de fidélité à l'Empereur.

 

 

 

 

 

 

 

 

Le grand mouvement de la Réforme commence par un " affichage sauvage "

Les Quatre-vingt-quinze thèses théologiques sont placardées sur la porte de la cathédrale de Wittenberg, Martin Luther a rapidement compris le parti qu'il pouvait tirer des procédés de diffusion de l'image et du texte...

Dès la fin du XVème siècle, la majorité des artistes allemands se liguent contre Rome, Lucas Cranach (1472-1553), Hans Holbein le Jeune ou Niklauss Manuel Deutsch multiplient les estampes qui représentent des paysans en train de pendre des moines venus leur monnayer des Indulgences.

Durer : un orfèvre, inventeur de la gravure sur métal
Dürer, bourgeois de Nuremberg, qui perfectionne le mode de reproduction par l'invention de la gravure sur métal, épouse aussi la cause des paysans, et va jusqu'à insérer dans un manuel à l'usage des géomètres et architectes, Instruction sur la manière de mesurer le projet d'un " Monument commémoratif de la victoire des nobles " qui est, en fait, un monument funéraire à la gloire des paysans exterminés par l'armée des princes à Frankhausen ( en 1525). Tous les attributs du monde agricole sont rassemblés pour constituer une colonne qui porte à son sommet un paysan -" penseur " poignardé dans le dos par l'épée d'un seigneur ! voir l'étude de la pièce de J.P. Sartre "Le Diable et le Bon Dieu"

 

" le bréviaire de la revanche imaginaire des pauvres "
Mais, exceptée la Bible, les livres restent chers. Ils diffusent une culture inaccessible au commun ( traité de médecine, livre d'histoire antique, ouvrages techniques -comme d'ailleurs était pensé Le Prince de Machiavel). Le livre n'a d'abord contribué qu'à accroître les connaissances au sein d'une caste de privilégiés.
L'estampe est la compensation pour un plus grand nombre de l'invention de l'imprimerie. Elle est, selon Robert Philippe, " le bréviaire de la revanche imaginaire des pauvres ". Mais elle mit trois siècles pour acquérir les conditions d'une réelle diffusion de masse. Il fallut pour cela attendre le XIXème et la presse à grand tirage.

Les gravures en tailles-douces des gazettes
Au XVIIème les gravures en tailles-douces ornent les gazettes destinées aux salons aristocratiques. Le langage du graphisme politique est encore codé, saturé de métaphores classiques et de jeux de mots latins mais déjà, des précautions sont prises pour être entendus des moins érudits. Ainsi, cette gravure représente une embarcation portant les armes de France et de Navarre : elle est gouvernée, non par Louis XIII, mais par Richelieu ; le Roi et le cardinal quittent la Rochelle après la prise de la cité huguenote.
La légende sort de la propre bouche du roi sous une forme qui anticipe les " bulles " des B.D. : " Va navire, ne crains rien, ton pilote est un Dieu : jamais ancre ne fut dans un si Riche-Lieu. " De sa main gauche le Cardinal tient fermement le timon ; quant à sa main droite, elle attrape discrètement une ancre derrière les cordages : c'est une allusion au fief du Maréchal d'Ancre dont Richelieu a hérité après la mort de Concini.


La naissance des journaux
En élargissant son horizon de diffusion aux bourgeois et à la foule variée qui peuple les cabarets, les tavernes et les cafés, la caricature a délaissé les codes et symboles savants pour adopter un langage universel fait d'allusions visuelles évidentes : une soutane, une croix ou un chapelet désigne le religieux ; l'épée, le panache ou le blason indique le noble ; la couronne, le roi…
NB.Le roi fut rarement l'objet d'une mise en cause directe dans les estampes populaires antérieures à la Révolution. La caricature est laïque dans l'âme ; quand, au XVIIIème, elle attaque la figure du Roi, elle consomme sa désacralisation aux yeux du peuple.

La Révolution invente de nouveaux symboles : la cocarde, le bonnet phrygien ; la caricature (qu'elle émane des révolutionnaires ou des contre-révolutionnaires) les assimile aussitôt à son répertoire. Les journaux se multiplient, tel L'ami du peuple créé par Marat dès septembre 1789. La caricature y prend une valeur narrative. L'Histoire s'accélère et requiert la mobilisation rapide des foules ; la caricature est l'aiguillon qui éperonne l'opinion et enflamme la poudre du mécontentement politique. Dès lors, la représentation n'est plus seulement l'évocation et le témoignage des événements politiques, elle agit sur l'Histoire, elle provoque et suscite ses rebondissements.

La lithographie et presse à grand tirage
"Père-scie" par Auguste Bouquet (1810-1846) l'homme qui protège les journaux de son corps fait penser à Daumier.

Avec la première révolution industrielle en Angleterre puis en France, la dénonciation de la pauvreté des masses ouvrières coïncide avec l'essor de la presse à grand tirage : c'est l'âge d'or de la caricature !

La lithographie est un procédé bon marché pour l'imprimeur puisqu'il permet de se passer de graveur professionnel.

Les artistes réalisent désormais eux-mêmes leurs dessins sur une pierre calcaire tendre à l'aide d'encres grasses fixées chimiquement ; il suffit alors d'une légère préssion pour obtenir autant de copies qu'on le désire. Cette tecnhique permet une extrème souplesse du dessin et assure un parfait rendu au tirage.

Les plus grands peintres et dessinateurs du XIXème siècle l'ont adoptée (Ingres, Guéricault, Girodet, Delacroix, Goya, Gavarni et Daumier). Cette technique a permis une large diffusion des oeuvres dans la clientèle bourgeoise. Les magasins de lithographies se multiplient dans toutes les grandes villes(comme celui du beau-frère de charles Philipon dans le passage Vero-Dodat). Balzac les appelle "Les musées en plein vent".


Conservatisme contre élan révolutionnaire
Grandville : La France dévorée prar les corbeaux de toute espèces.. En Europe, les monarchies en place sont bien décidées à étouffer toute nouvelle poussée révolutionnaire. En Allemagne, les associations d'étudiants sont interdites, et partout la liberté d'expression de journaux est mise sous haute surveillance. L'opposition est contrainte à se cacher. Les sociétés secrètes pullulent, elles sont, de fait, connues et d'ailleurs allégrement conspuées par les caricatures qui émanent des journaux officiels des gouvernements.
Mais l'opposition s'organise : libéraux, républicains, et nostalgiques de l'Empire se réunissent dans les cafés pour commenter l 'actualité rapportée par les journaux.

 

Le 25 Juillet 1830 Chanteleuez, ministre de la Justice, demande à Charles X de prendre des mesures contre la liberté de la presse en même temps que, par décret, la chambre est dissoute et le droit de vote aboli ! Le Moniteur, journal officiel, publie l'ordonnance. Les journalistes réunis dans les bureaux du National, grand journal de l'Opposition, réagissent et rédigent une lettre de protestation qui, au matin du 27 juillet, tapissait tout paris. Le Pouvoir réplique par la confiscation des machines, la saisie des affiches, et oblige le journal à fermer. Paris s'enflamme, les premières barricades sont dressées dès l'après-midi du 27 et les émeutes éclatent dans la nuit, la poudrière de la Salpetrière et de l'Hôtel de Ville tombent aux mains des insurgés. Le 29 le général Marmont qui dirige les troupes officielles se retire à Saint Cloud. Contraint à L'exil, Charles X s'embarque le 16 août pour l'Angleterre.

De nombreuses lithographies d'Adam et de Bellangé dessinent les barricades, et les rencontres entre les insurgés et les troupes gouvernementales. Le traitement de ces scènes diffère de beaucoup des représentations de la révolution de 1789. Il n'y a plus de grande perspective, ni d'élan épique, l'héroïsme se loge non dans la marche de troupes organisées, mais dans des actions de petits groupes improvisés. Les témoignages lithographiques des " Trois Glorieuses " ( c'est-à-dire les trois journées du 27, 28, et 29 juillet 1830) mêlent l'espoir et l'inquiétude.

La Caricature et le Charivari
 Charles Philipon au milieu et Daumier à droite à la prison de Sainte Pélagie La révolution libérale porte au pouvoir Louis-Philippe. A cette époque Charles Philippon et Balzac (qui s'étaient rencontrés chez un imprimeur quelques années plus tôt) s'associent pour fonder un nouveau journal : La caricature. Ils ont tous deux trente ans, et ont déjà collaboré à la Silhouette, l'un des premiers périodiques en France à avoir associé l'image et le texte. Balzac et Philipon decident d'en reprendre la formule en accentuant la profondeur des analyses et la virulence des croquis. La caricature eut d'emblée un immense succès. Pour toute l'Europe, elle devint le Journal des Républicains :
"En vain le Parquet lâchait-il contre elle ses réquisitoires et ses limiers ; elle dessinait le Parquet et elle avait toujours le dernier mot !" (Pierre Larousse)

En moins de deux ans La Caricature eut 7 procès et encourut quatre condamnations. On dit que Charles Philippon passa plus de temps à la prison de Sainte-Pélagie que dans son bureau ! Balzac fournit une trentaine d'articles au journal, tous sous des pseudonymes à particule mais qui servaient aussi à d'autres membres de la rédaction. A partir de 1831, Balzac se plonge avec la Peau de chagrin dans l'élaboration de La Comédie humaine ; il prend ses distances avec le journalisme, (sans y renoncer toutefois absolument). En 1834 La Caricature est interdite, Charles Philipon lance Le Charivari où se retrouvent ses plus fidèles collaborateurs, notammment Honoré Daumier. Voir à ce propos notre présentation du Ventre Législatif

Pour Pierre Larousse qui entreprit le Grand Dictionnaire universel du XIX ème siècle (1867), "De toutes les armes adoptées par les Républicains... la plus redoutable, la plus cruelle et la plus efficace fut la moquerie. La moquerie qui dans le pays de Voltaire a si souvent le dernier mot, la moquerie qui a fait tomber la Bastille et éteint les derniers bûchers de l'Inquisition, mina dans sa base le trône de Juillet et quand, dix huit ans plus tard, ce trône tombait en poussière on pouvait dire que la moquerie l'avait voulu ainsi".

Droit de timbre et censure
 Caricature de Cham dénocant le rétablissement du droit de timbre " Attention ,vous assommez tout le monde indistinctement !... vous êtes par trop timbrée !" La courte révolution de 1848 aura beau proclamer les libertés de presse et de réunion (en même temps qu'elle annonce la République et le suffrage universel), dans les mois qui suivent, la forte majorité conservatrice de l'Assemblée, craignant le retour de l'instabilité révolutionnaire, décide la fermeture des clubs, impose un droit de timbre qui augmente le prix de jouranux, et durcit la censure.
Ce sont les fameuses lois sur la presse de 1850.

Le coup d'Etat du 2 décembre de Louis Napoléon ne rendra pas aux journaux de meilleures conditions de diffusion.

La caricature délaisse les personnalités politiques trop protégées pour développer une satire plus sociale, qui traque le ridicule et l'injustice dans les scènes de la vie ordinaire. Honoré Daumier passe en revue les gens de justice, les médecins, l 'école, les velléités d'instruction de celles qu'on appelle alors les"bas-bleus". Il campe aussi les aventures de l'escroc Robert Macaire et de l'informateur de police Ratapoil.

 

La télévision et les Guignols
L'histoire de la caricature montre qu'il y eut toujours des artistes capables de détourner avec "brillo" les effets des censures politiques. Mais l'âge de la télévison et les nouveaux cultes de l'image et du divertissement inversent les données du problème. Aujourd'hui peu importe ce que l'on dit de vous, l'important est qu'on ne vous oublie pas ! Etre caricaturé lors d'une émission de grande écoute entretient la célébrité, c'est donc un signe de distinction.
D'où le caractère subversif d'un autre travail de journalisme qui piège les responsables politiques et les célébrités du monde journalistique en inversant la logique de la visibilité comme le fait Pierre Carles dans Pas vu, pas pris (Grand prix du jury et prix du public de Belfort.

Nous vous renvoyons aussi aux analyses de Régis Debray (pages 463 et suivantes de Vie et mort de l'image, Folio Essais)

"Il suffit d'un larynx et d'une imprimante pour articuler et publier un discours ; pour proposer une affiche en quadrichromie à des passants, [a fortori pour occuper un temp d'antenne lors d'une émission télévisée] il faut d'abord des capitaux ! L'irruption simultanée de l'argent dans l'image et l'image dans la persuasion collective contribue à résorber l'espace civique dans l'espace économique, rabat un peu plus l'égalité de droit sur l'inégalité de fait et réserve aux plus fortunés les fonctions dirigeantes... A ce titre la domination de l'image télévisuelle sur l'imprimé a été un formidable accélérateur de corruption du jeu lui-même et des joueurs politiques. Le coût ahurissant des campagnes électorales et de l'entretien au jour le jour d'une "bonne image" incite à la caisse noire, au détournement de fonds publics et au retour en force des chevaliers d'industrie"