Mascarade, Antonio Mancini, Florence, Galerie d'Art Moderne  Le mystère de l’autre

Les enjeux philosophiques d’une conception de l’intériorité comme secret ( à révéler ou à découvrir) :

A soupçonner sous les comportements d’autrui  une identité cachée, on s’expose à toujours le penser  comme coupable de feinte et finalement impénétrable alors qu’ il faut peut-être  abandonner simultanément  l’idée d’identité et celle de secret.

Si autrui est pour moi  l’inconnu, c’est peut-être moins par parce qu’il  dissimule  que parce qu‘il est essentiellement divers et toujours en devenir, parce qu’il n’a pas d’identité  propre, définitive.

 A l’idée d’une identité constituée  en intériorité cachée s’oppose une autre  conception selon laquelle il n’y a plus d’identité stable mais des individus en  relation  avec des ajustements de comportement, des accommodations, qui précisent à chaque fois le contour d’une personnalité en continuelle  construction..

Il n’y a pas d’identité mais des  rôles multiples qui déroulent  des  caractères différents  à la faveur  de nouvelles  situations ;

Cette intuition retrouve par un autre biais la pensée de Sartre dans L’être et le néant, quand il analyse le devoir de sincérité tel qu’il est traditionnellement pensé « Péché avoué, à moitié pardonné ». Sartre critique la façon dont les autres veulent nous acculer à avouer ce que nous sommes ; à « être sincères »  comme si nous étions réductibles  à un mot, une catégorie psychologique. ( 101 NRF «  Le champion de la sincérité, dans la mesure où il veut se rassurer, alors qu’il prêtant juger, dans la mesure où il demande à une liberté de se constituer en tant que liberté comme chose, est de mauvaise foi ». Une conscience déborde toujours en complexité et possibilités la particularité d’une de ses manifestations.

               « Je est un autre » C’est parce qu’il est indéfinissable et en perpétuel devenir  qu’il est  inconnaissable.

Nietzsche dans La généalogie de la morale montre comment la société induit chacun de nous à croire en l ’identité des autres et de nous-mêmes pour nous conduire à accepter   contrats et engagements qui nous lient  indépendamment du changement. La conception classique de l’identité est le produit d’une « métaphysique de bourreau » pour reprendre l’expression de La Généalogie de la morale :Première dissertation  §13 ; §14 ; §15 La reconnaissance d’une identité stable permet de  décréter l’homme coupable de changement.

L’analyse de l’autre permet de débusquer une fraude intellectuelle. Plutôt que d’admettre  l’évolution d’une personnalité en perpétuelle improvisation d’elle-même, on préfère invoquer la dissimulation initiale puis la révélation d’une identité profonde,  d’abord cachée.

*Le devenir autre de l’ami (amant) enseigne l’altérité de l’autre :  voyez l’étude des Affinités électives de Goethe et le corrigé de dissertation sur l’amitié